Et nous voici repartis dans l'aventure...
Cette fois ci avec une pièce de Ferdinand Beyer : Guillaume Tell qui fait partie d'un ensemble de plusieurs pièces rassemblées dans un "Bouquet de Mélodies". Contrairement à la partition précédente où nous avons vu une adaptation pour orchestre d'une partition de piano, il s'agit ici de l'inverse. Ferdinand Beyer nous propose une adaptation piano de l'ouverture du Célèbre Guillaume Tell de Rossini.
Je n'ai pas trouvé d'enregistrements piano de cette pièce...( Appel aux pianistes...) mais nous allons reprendre la pièce de Rossini pour orchestre. Place à la musique...
Peu d'informations concernant Ferdinand Beyer sur la toile. J'ai quand même trouvé une critique très sévère de la part de François-Joseph Fétis, compositeur, critique musical et musicographe belge qui écrivit dans sa "Biographie universelle des musiciens et bibliographie générale de la musique" sur une réédition de 1881 page 86 :
Cet infatigable fabricant de musique plus que médiocre, né à Querfurt, dans la Prusse Saxonne, le 25 juillet 1805, est mort à Mayence le 14 mai 1863. Néanmoins, son commerce était tellement florissant, qu'il s'est trouvé un artiste assez avisé pour recueillir sa succession et prendre la suite de ses affaires. Un compositeur de musiquette de piano a en effet adopté le pseudonyme de Beyer, pour satisfaire le public amateur des morceaux de ce dernier. Il a seulement changé l'initiale du prénom; au lieu de F.beyer, on met sur le titre S.Beyer, et tout est dit.
BEYER (Ferdinand)
Cet infatigable fabricant de musique plus que médiocre, né à Querfurt, dans la Prusse Saxonne, le 25 juillet 1805, est mort à Mayence le 14 mai 1863. Néanmoins, son commerce était tellement florissant, qu'il s'est trouvé un artiste assez avisé pour recueillir sa succession et prendre la suite de ses affaires. Un compositeur de musiquette de piano a en effet adopté le pseudonyme de Beyer, pour satisfaire le public amateur des morceaux de ce dernier. Il a seulement changé l'initiale du prénom; au lieu de F.beyer, on met sur le titre S.Beyer, et tout est dit.
Ca ne rigolait déjà pas les critiques à l'époque... on se croirait dans le masque et la plume de Jérome Garcin...... :)
Je pense que l'on ira pas plus loin sur ce Ferdinand.
Mais c'est drôle il a même œuvré sur un des monuments de Carl Maria Von Weber de la partition précédente. Toujours sur Gallica, j'ai trouvé cette image :
Reprenons sur d'autres pistes, un petit point sur ce Guillaume Tell est intéressant....
Qui sait ou se souvient que Guillaume Tell symbolise la libération et l'indépendance de la Suisse ? Personnellement c'est une découverte. Car au delà de la légende de la pomme, je n'en savais je l'avoue pas grand-chose. Et surtout pas que pendant des années l'arbalète symbolisait la qualité de fabrication Suisse.
Guillaume Tell
Petit résumé de la légende : En 1307 dans le Canton d'Uri le représentant impérial (Bailli ou gouverneur) se nommait Hermann Gessler et représentait l'autorité Autrichienne des Habsburg,, Il fit ériger un mât sur lequel il posa son chapeau aux couleurs de l'Autriche et imposa à chaque habitant de la contrée passant devant le mât de saluer celui-ci comme si le porteur du chapeau était présent...
Guillaume Tell passa plusieurs fois devant le mât sans broncher. Cet événement fût rapporté à Gessler et celui-ci imposa à Guillaume Tell de tirer à l'arbalète sur une pomme posée sur la tête de son fils (Walter). Guillaume Tell réussit l'exploit et fendît la pomme en deux d'un carreau d'arbalète. Il avait cependant prévu une deuxième flèche pour tuer le gouverneur en cas d'échec... Pour cette 2eme trahison il fut amené par Gessler et ses gardes à travers le lac des 4 cantons en direction du château du maître. Un orage éclata, le lac était déchaîné. Les gardes détachèrent Guillaume Tell et lui demandèrent de tenir la gouverne pour les sortir de ce mauvais pas. Guillaume Tell en arrivant sur le bord sauta sur la berge laissant l'embarcation à la dérive. L'endroit s'appelle toujours le"saut de Tell". Retrouvant Gessler sur le chemin du chateau, il lui tendit une embuscade et le transperça de son arbalète avec le 2eme carreau qu'il lui réservait. Il libéra alors le peuple Suisse.
Statue de Guillaume Tell à Altdorf en Suisse |
Ahhh les légendes...
L'opéra de Rossini, une analyse par Hector Berlioz
Décidément nous retrouvons Berlioz qui fit une belle analyse de l'oeuvre notamment de cette ouverture. Il en décrit assez précisément les quatre parties dans la revue " La gazette Musicale de Paris" n°41 le dimanche 12 octobre 1834.
Certes nous apprenons que Boieldieu n'est plus dans une prose mais d'un glauque... Ca a aussi du bon le 21eme siècle...
Bref en tournant la page nous découvrons toute cette description de Berlioz à Propos de Guillaume tell :
"Rossini las d'entendre sans cesse critiquer ses ouvrages sous le rapport de l'expression dramatique , plus las peut-être encore de l'admiration aveugle de ses fanatiques partisans , employa un moyen fort simple pour imposer silence a l'une et se débarrasser des autres , ce fut d'écrire une partition sérieusement pensée, méditée a loisir et consciencieusement exécutée d'un bout à l'autre
suivant les conditions exigées de tous temps par le bon sens et le goût.
Il fit Guillaume Tell.
Ce bel ouvrage doit donc être considéré comme l'application des nouvelles théories de l'auteur , comme l'éveil de plus grandes et de plus nobles facultés dont les exigences du peuple sensuel pour lequel il écrivit jusqu'alors avaient nécessairement rendu le développement impossible.
C'est sous- ce rapport que sans engouement , comme sans préventions aucunes , nous allons examiner la dernière partition de Rossini.
A n'envisager que les suffrages qu'il a mérités , les applaudissements qu'il a excités, les conversions qu'il a faites, Guillaume Tell a sans doute obtenu un succès immense; succès d'admiration spontanée chez le uns, de réflexion et d'analyse chez beaucoup d'autres. Et pourtant on est forcé d'avouer qu'il n'a pas pu joindre à cette gloire, celui de tous les succès auquel les directeurs , souvent même les auteurs , sont plus sensibles, je veux dire le succès populaire, le succès a"argent. Le peuple des dileltanli est hostile à Guillaume Tell qu'il trouve froid et ennuyeux. Les causes d'une pareille divergence d'opinions, ressortiront je l'espère, des études que nous proposons au lecteur de faire avec nous sur cette importante production.
Suivons l'auteur pas à pas dans la nouvelle route où il est entré, et qu'il eût parcourue d'une marche rapide et plus ferme sans quelques regards que la force d'habitudes enracinées lui a fait
jeter en arrière. Ces rares exemples viennent confirmer encore le vieil adage :
« Dans les arts il faut un parti pris, les moyens termes ne valent rien. »
OUVERTURE.
Pour la première fois Rossini a voulu composer son ouverture dans les données dramatiques admises par tous les peuples de l'Europe , les Italiens seuls excepté. En débutant dans ce style de musique instrumentale, qui, pour lui, était entièrement nouveau, il en a agrandi la forme , de telle sorte , que son ouverture est devenue, a vrai dire, une symphonie en quatre parties bien distinctes, au lieu d'un morceau a deux mouvements dont on se contente ordinairement.
La première (Ecoute du lien Youtube du début jusqu'à 2:45), peint assez bien, a mon avis, le calme d'une solitude profonde, ce silence solennel de la nature, quand les élénieïits et les passions humaines sont en repos, c'est poétiquement commencer ; des scènes animées qui vont suivre naîtra un fort beau contraste; contraste d'expression, contraste même d'instrumentation; cette première partie étant écrite seulement pour cinq violoncelles solo
accompagnés du reste des basses et contrebasses , pendant que l'orchestre entier est mis en action dans le morceau suivant : l' Orage. (Ecoute de 2:45 ou le temps se gâte puis l'orage éclate à 3:42 jusqu'à 5:32) Ici l'auteur aurait pu, ce me semble, abandonner avec avantage les rythmes carrés, les phrases a correspondances égales , les cadences a retours périodiques, qu'il emploie avec tant de bonheur partout ailleurs : « souvent un beau désordre est un effet de l'art » , a dit un auteur dont la réserve classique ne peut être contestée. Beethoven l'a prouvé , dans son prodigieux cataclysme de la symphonie pastorale; aussi a-t -il atteint le but que le compositeur italien n'a fait qu'entrevoir sans l'atteindre. Plusieurs effets d'harmonie sont remarquables et ingénieusement mis en évidence; de l'accord de neuvième mineure , entre autres naissent des effets vraiment singuliers. On est fâché de retrouver encore dans l'orage de Guillaume Tell , ces notes jetées, d'instruments à vent que les amateurs appellent des gouttes de pluie ; ce moyen avait été déjà employé par Rossini dans la petite ondée du Barbier de Séville, et dans je ne sais quel autre opéra. En revanche il a su tirer de la grosse caisse sans cimballes des bruits pittoresques où l'imagination retrouve volontiers le retentissement d'un tonnerre lointain parmi les anfractuosités des montagnes. Le decrescendo obligé de la tempête est ménagé avec une rare habileté. En somme, ce n'est pas saisissant, foudroyant, comme la tempête de Beethoven, tableau musical auquel il sera peut-être impossible de trouver jamais un pendant ; il n'y a pas là ce caractère sombre et désolé qu'on admire dans l'introduction d'Iphigénie en Tauride; mais c'est beau et plein de majesté.
Malheureusement le musicien se laisse toujours voir; nous le suivons constamment dans ses combinaisons, dans celles même qui paraissent le plus excentriques. Beethoven au contraire a su se dérober entièrement aux investigations de l'auditeur; ce n'est plus un orchestre ; ce n'est plus de la musique qu'on entend , mais bien la voix tumultueuse des torrents du ciel , mêlée aux fracas des torrents de la terre, aux éclats furieux de la foudre, au froissement des arbres déracinés, aux raffales
d'un vent exterminateur, aux cris d'effroi des hommes et aux beuglemens des troupeaux. Cela consterne, cela fait frémir; l'illusion est complète. L'émotion que donne Rossini dans la même circonstance est loin d'atteindre a un pareil degré. 'Mais poursuivons.
A l'orage succède une scène pastorale de la plus grande fraîcheur (Ecoute de 5:32 jusqu'à 8:03 où les trompettes viennent stopper la quiétude); la mélodie du cor anglais en style de ranz de vaches est délicieuse, et les folâtreries de la flûte au-dessus de ce chant calme, sont d'une fraîcheur et d'une gaîté ravissantes. Nous remarquerons en passant que le triangle, qui frappe par intervalles de petits coups pianissimo, est ici fort à sa place ; c'est la sonnette des troupeaux paissant tranquillement pendant que les bergers se renvoient leurs joyeuses chansons. Ah! vous allez voir un effet dramatique dans cet usage du triangle ?nous dira-t-on; en ce cas veuillez nous apprendre ce que représentent les violons, les altos, les basses, les clarinettes, etc.? A cela je répondrai que ce sont des instruments de musique, qu'ils sont les conditions de l'existence de l'art, tandis que le triangle n'étant qu'un simple morceau de fer dont le son n'est pas rangé dans la classe des sons appréciables, ne doit être entendu au milieu d'un morceau doux et calme que dans le cas où sa présence y serait parfaitement motivée, autrement il ne paraîtrait qu'une bizarrerie ridicule. Aux dernières notes du cor anglais, qui chante la mélodie pastorale, entrent les trompettes sonnant une fanfare rapide (de 8:03 à 8:18), incisive, sur le si naturel, tierce majeure du ton de sol, établi dans le morceau précédent, lequel «devient en deux mesures dominans de mi majeur et fixe, ainsi d'une manière aussi simple qu'inattendue la tonalité de l'allégro suivant. Cette dernière partie de l'ouverture (de 8:18 jusqu'à la fin) est traitée avec un brio, une verve, qui excitent toujours les transports de l'auditoire, mais elle est entièrement établie sur un rythme aujourd'hui bien usé; et le thème est presque entièrement le même que celui de l'ouverture de Femand Cortès. Le trait en stacato des premiers violons , voltigeant du ton d'ut dièze mineur à celui de sol dièze mineur, est un épisode des plus heureux spirituellement jette au milieu de cette instrumentation guerrière; il offre en outre un moyen de retour au thème principal , qui donne a cette rentrée une impétuosité irrésistible; l'auteur en a su tirer parti fort habilement. La péroraison de
ce pétulant allegro est d'une grande chaleur. Enfin, malgré le défaut d'originalité du thème et du rythme, malgré un abus de grosse caisse fort désagréable dans certains moments et l'emploi un peu vulgaire de cet instrument frappant toujours les temps forts comme dans les pas redoublé où dans les musiques des bals champêtres, il faut avouer que l'ensemble du morceau est traité avec une supériorité incontestable, une verve telle que Rossini n'en avait peut être pas encore montré de si entraînante et que l'ouverture de Guillaume Tell est une oeuvre, d'un immense talent qui ressemble au génie à s'y méprendre."
Décidément j'aime beaucoup mon voisin de la cote Saint-André, ce fameux Hector Berlioz !
Pour finir ce 2ème volet, encore un petit détail : est imprimé en gaufrage sur le papier le magasin où la partition à été achetée ! Nous sommes du coté de Toulon. La maison SALF n'existe manifestement plus. Mais nous irons certainement sur sa piste plus tard...
et finalement voici les partitions en .pdf :